Créer son propre commerce n’est pas la seule voie vers l’indépendance. En France, des milliers de professionnels font chaque année le choix de reprendre une affaire existante. Moins risquée qu’une création ex nihilo, la reprise permet de s’appuyer sur une clientèle existante, un chiffre d’affaires déjà présent, et un lieu déjà connu des habitants.
En 2023, près de 29 000 reprises de fonds de commerce ont été recensées dans l’Hexagone. Qui sont ces repreneurs ? Pourquoi font-ils ce choix ? Quelles sont les clés d’une reprise réussie ? Voici un panorama complet, nourri de témoignages et de chiffres.
Pourquoi reprendre plutôt que créer ?
Reprendre un commerce, c’est souvent choisir une voie plus rapide vers la rentabilité. On estime qu’un commerce repris met deux fois moins de temps à atteindre l’équilibre financier qu’un commerce créé.
Les motivations principales sont :
- Un chiffre d’affaires existant
- Une clientèle fidèle
- Un emplacement sécurisé avec bail en cours
- La possibilité d’être formé ou accompagné par le cédant
« Reprendre, c’est bénéficier d’une histoire, d’une réputation, d’un tissu local. Encore faut-il savoir l’analyser avec lucidité. »
— Pascal R., conseiller CCI
Portraits croisés de repreneurs
Nathalie, 52 ans — ex-DRH devenue boulangère
« Je voulais quitter la vie de bureau. J’ai repris une petite boulangerie dans l’Ain. Le cédant m’a formée 3 mois. Aujourd’hui, je suis sereine, à mon compte, et la clientèle est restée. »
- Fonds acheté : 98 000 €
- Travaux : 27 000 €
- Prêts obtenus : Réseau Initiative + Adie
- Résultat : rentable dès le deuxième trimestre
Kevin et Salomé, 34 et 31 ans — salon de toilettage à Angers
« On a quitté Paris pour entreprendre. Une amie vendait son affaire. On a gardé la salariée, refait la vitrine. En six mois, le chiffre d’affaires a augmenté de 10 %. »
- Prix du fonds : 38 000 €
- Travaux : 6 000 €
- Loyer : 850 €/mois
- Délai entre signature et réouverture : 5 semaines
Rachid, 40 ans — garage automobile dans le Jura
« Je travaillais comme salarié depuis 15 ans. En reprenant ce petit garage, j’ai triplé mon revenu net. Je bosse beaucoup, mais c’est pour moi. »
- Achat : 55 000 €
- Prêt d’honneur : 30 000 €
- Clientèle locale stable
- Travaux : minimes
Les étapes clés d’une reprise réussie
1. Identifier le bon commerce
Consulte les plateformes spécialisées comme Transentreprise, CessionPME ou Bpifrance Transmission. Les réseaux de chambres consulaires ou les notaires sont aussi de bons relais.
2. Évaluer objectivement le fonds
Analyse les éléments suivants :
- Chiffre d’affaires et EBE
- Loyer et bail commercial
- État du matériel
- Salariés à reprendre
- Risques cachés (concurrence, travaux à venir, etc.)
3. Négocier et formaliser
Un compromis est souvent signé avant l’acte définitif. Attention aux délais de préemption, aux droits d’enregistrement, et aux conditions suspensives (obtention de financement, etc.).
Ce qu’il faut éviter
- Se précipiter sans audit comptable
- Reprendre un commerce dont le chiffre dépendait uniquement de la personnalité du cédant
- Ne pas prévoir de fonds de roulement suffisant
- Sous-estimer le coût de la reprise (travaux, stocks, frais de notaire…)
L’alternative à connaître : la location-gérance
Avant de racheter, certains commerçants proposent une location-gérance. Tu exploites le fonds pendant quelques mois, sans en être propriétaire, tout en testant le concept, la clientèle et la rentabilité.
Cela permet :
- Une montée en compétence progressive
- De prouver ta capacité à exploiter le commerce
- De convaincre les financeurs pour l’achat définitif
Quelques chiffres clés
(Source : CCI & Altares)
- Durée moyenne d’un processus de reprise : 6 à 9 mois
- Apport personnel moyen conseillé : 30 % du prix du fonds
- Plus de 60 % des repreneurs sont accompagnés par un expert ou une structure locale
- Environ 70 % des commerces repris restent en activité au-delà de 5 ans (contre 55 % en création pure)
Conclusion
Reprendre un commerce, c’est plus qu’un choix stratégique : c’est souvent un projet de vie. Moins risqué que la création, ce modèle offre de réelles garanties pour ceux qui savent s’entourer, analyser les comptes, et prendre le temps d’étudier le bon dossier.
C’est aussi une façon de rejoindre un territoire, de s’inscrire dans un tissu local, et de bâtir une activité plus rapidement viable.
Checklist du repreneur
- Comptes analysés avec un professionnel (EBE, CA, charges)
- Bail commercial en cours et conforme
- Reprise formalisée (lettre d’intention, compromis)
- Plan de financement monté (banque + prêt d’honneur si besoin)
- Accompagnement prévu par le cédant
- Trésorerie sécurisée pour les 6 premiers mois