Combien vaut mon affaire ? Différentes méthodes peuvent être utilisées pour cet exercice complexe. L'évaluation va déterminer une fourchette de prix basée sur une approche économique, financière et sur des données plus ou moins objectives.
Mais attention, le prix final sera le résultat de la négociation entre cédant et repreneur...parfois loin de la valeur estimée au départ.
Evaluer son affaire est un exercice complexe. Différentes méthodes peuvent être appliquées. Qui tiennent compte soit du chiffre d’affaires, indicateur qu’ il faudra pondérer au regard de nombreux autres éléments comme les travaux à réaliser, le potentiel de développement de l’affaire, l’évaluation du stock, l’analyse du bénéfice et le bail commercial…Soit sur les résultats actuels et futurs.
L’évaluation va déterminer une fourchette de prix, basée sur une approche économique, financière et sur des données plus ou moins objectives. Il ne faut pas oublier que l’entreprise doit beaucoup à son dirigeant, surtout dans le commerce et l’artisanat et que sa valeur sera donc liée à sa personnalité et à son équipe de travail. Elle inclut donc une part de subjectivité difficile à chiffrer.
Après cet exercice, le plus souvent effectué par un professionnel du chiffre, on est souvent confronté à un vendeur qui estime que son affaire vaut beaucoup plus, compte-tenu de la dimension affective, et un acheteur, qui lui raisonne plus froidement et pense qu’elle en vaut moins…Il faudra que donc que cédant et repreneur se mettent d’accord.
Le prix final pourra donc être loin de la valeur estimée au départ. Tout sera affaire de négociations…
Pour évaluer l’affaire que vous souhaitez reprendre, vous devez procéder à un certain nombre de diagnostics permettant de lister ses points forts et faibles. Différentes méthodes existent, apportant chacune une vision de l’entreprise.
Vous souhaitez reprendre un commerce ou une affaire artisanale et vous avez repéré une affaire, qui semble vous convenir. Avant de constituer un dossier de reprise, vous allez devoir évaluer l’entreprise, c’est-à-dire lui donner une valeur marchande. Pour cela, vous devrez procéder à un certain nombre de diagnostics qui permettront de lister ses points forts et ses points faibles. Avant de passer à la phase de l’évaluation proprement dite.
Si de votre côté, vous souhaitez céder votre entreprise, il faut savoir que la vente d’une affaire se prépare environ deux ans à l’avance. Car vous allez vendre le travail de votre vie ! « Il faut prendre des mesures pour se préparer à la vente et se donner le temps de corriger les points faibles », conseille Olga Romulus, expert-comptable, à la direction des relations extérieures du groupe Fiducial.
Par exemple, si vous possédez un salon de coiffure depuis 20 ans, il est probable qu’il ne soit plus tout à fait au goût du jour. On n’y trouvera pas de bornes Wi-Fi, de fauteuils massants, ni de bornes pour recharger son téléphone…Tous ces éléments, que l’on retrouve aujourd’hui dans des salons de coiffure plus modernes.
En cas de cession, les salariés vont suivre automatiquement, vous aurez l’obligation de les informer au plus tard deux mois avant la date de la signature de la vente, en vertu de la loi sur l’économie sociale et solidaire du 1er novembre 2014, dont le décret d’application s’applique à compter du 1er janvier 2016. Le but étant de permettre aux salariés de s’organiser pour présenter une offre d’achat.
Avant même cette obligation légale, vous pouvez repérer dans votre équipe les repreneurs potentiels, afin de les aider à prendre la suite. Et identifier les cas difficiles qui risquent de poser problème. Vous avez donc toute une phase de préparation bien en amont de la décision.
Ensuite, vous passerez à une phase plus juridique. Est-ce que je vends mon fonds de commerce ou est-ce que je vends les parts de ma société ? Il faut étudier quels sont les avantages et les inconvénients de chaque solution.
« En cas de rachat du fonds de commerce, on rachète la clientèle, l’achalandage, la notoriété, le droit au bail, le personnel et lematériel », précise Fréderic Audin, fondateur de la société Axeryss, cabinet indépendant d’expertise-comptable et de conseils. Le repreneur n’est pas dans l’obligation de reprendre le stock, contrairement au rachat de parts. La négociation se fera de gré à gré. « Le stock s’évalue toujours à part », ajoute Frédéric Audin.
En cas de rachat d’une société, celle-ci sera reprise en l’état, avec ses engagements, ses créances et ses dettes, les contrats en cours et tous les autres engagements. L’entreprise ne se valorise pas sur le passé mais sur le futur. « La principale méthode repose sur l’actualisation future des flux de trésorerie. Il faut se projeter dans le futur, ce qui demande un effort important pour la formulation du business plan ou du prévisionnel d’exploitation », explique Fréderic Audin.
Dans ce contexte, le cédant aura tout intérêt à présenter un prévisionnel le plus vendeur possible et le repreneur devra le challenger. C’est pourquoi il va demander à ce qu’on lui communique tous les comptes. Cela peut se faire par le biais d’une « data-room », le cédant laisse à la disposition de l’acquéreur tous les documents à caractère social, financier… Celui-ci devra regarder s’il y a des évènements à caractère exceptionnel, qui ont pu influer sur les résultats.
Le cédant qui part à la retraire peut trouver un intérêt à vendre sa société : « il se dit : j’arrête, je vends tout et je passe à autre chose ». Pour un repreneur, racheter une société est un peu plus complexe.
Ayant à sa charge le coût fiscal de la plus-value, le vendeur doit bien étudier le régime des plus-values de cession, sachant qu’il y a un certain nombre d’exonérations. « Il doit mener une étude pour savoir s’il a plus intérêt à vendre son fonds ou sa société », appuie Olga Romulus (Fiducial). Le repreneur aura lui aussi des coûts à supporter, tels que les droits de mutation mais ce sont des coûts officiels, il n’y aura pas d’optimisation possible.
Un certain nombre de diagnostics sont à effectuer pour rassembler le maximum d’informations sur l’entreprise. Tels que le diagnostic des moyens, de l’activité, financier humain, juridique, et Qualité Sécurité, Environnement (QSE)… « Chez Fiducial, nous menons un diagnostic en cinq points : commercial, humain, juridique, financier et investissement (accès handicapés). En effet, si l’établissement n’est pas aux normes, cela risque de faire baisser la valeur du fonds. Sur ces cinq grands thèmes, il y a une quarantaine de questions, que nous pondérons par un coefficient au bout de la chaîne », complète Olga Romulus (Fiducial).
Vous pourrez passer ensuite à la phase d’évaluation proprement dite et là, plusieurs méthodes sont possibles.
Première famille : il s’agit d’une évaluation en pourcentage du chiffre d’affaires et défini par secteur d’activité. Comme le pratiquent les Editions Francis Lefebvre. Par exemple, pour une boulangerie-pâtisserie, le fonds s’évaluera entre 60 et 110 % du CA HT par an. Avantage de cette méthode : elle est simple, et facile à calculer. « C’est pour cela qu’elle est toujours en vigueur, elle constitue en quelque sorte un référentiel commun », commente Frédéric Audin (Axeryss). Elle est surtout utilisée dans le commerce et l’artisanat. En revanche, la fourchette est sans rapport avec la rentabilité de l’entreprise.
Deuxième type de famille : celle des comparables, c’est-à-dire qu’il s’agit de trouver des transactions similaires dans des secteurs proches, qui donneront une idée de la valeur du marché. Pour cela, il est conseillé de se rapprocher des syndicats professionnels et d’avoir une bonne connaissance du marché local.
Autre famille : les méthodes qui prennent justement en compte la rentabilité. Celle-ci doit être réalisée par un professionnel, généralement un expert-comptable, qui va se baser sur l’état financier de l’entreprise. Si par exemple, le loyer est anormalement bas, il va le remettre au niveau du marché ou si le gérant se verse un salaire mirobolant, il va le remettre à un niveau considéré comme normal…Après, on applique à l’EBE (Excédent brut d’exploitation) retraité, un coefficient qui va de 1 à 10. « Si l’on est dans un environnement fragile, on sera plutôt autour de 1, si l’environnement est stable, on sera plutôt autour de 10 », indique Olga Romulus (Fiducial). Et de poursuivre sa démonstration : dans le cas d’une boulangerie dont l’EBE retraité est de 50 000 euros par an, dans un environnement plutôt bon, on appliquera un coefficient 5 et la boulangerie sera valorisée à 250 000 euros. La rentabilité est un critère très important, d’autant que le repreneur aura une pression financière en raison de son emprunt à rembourser.
« La plus précise repose sur l’évaluation du droit au bail et la rentabilité de l’exploitation (EBE) », estime de son côté Frédéric Audin (Axeryss). La valeur du fonds de commerce étant la somme de ces deux données. « On va valoriser cet EBE selon un coefficient de 3 à 5 pour les fonds exploités par les indépendants et pour les fonds exploités par les enseignes nationales avec un ratio de 5 à 8 car le taux de marge et les chiffres d’affaires sont plus importants », complète l’expert-comptable.
On le voit, il n’existe pas une seule et unique méthode pour valoriser le fonds de commerce. Chacune apporte sa vision de l’entreprise. « L’acquéreur aura intérêt à utiliser les dernières méthodes, axées sur la rentabilité afin de challenger le prix qu’on lui propose », suggère Frédéric Audin.
Car on va le voir, l’évaluation ne fera pas le prix mais une fourchette dans laquelle pourront se mener les négociations.
L’évaluation ne fait pas le prix mais donne une fourchette pour mener des négociations. Reste ensuite au cédant et au repreneur à se mettre d’accord sur le montant final auquel va se conclure l’achat. Ce qui varie au cas par cas, commerce par commerce.
Vous voulez reprendre un commerce ou une affaire artisanale et vous avez procédé à son évaluation, en choisissant une des méthodes possibles (comparatives, rendement…) Il faut bien savoir que celle-ci ne fera pas le prix mais va donner une fourchette dans laquelle on va mener des négociations. « Elle permet de donner des arguments au repreneur et au cédant et d’être un point de départ », souligne Olga Romulus, expert-comptable, à la direction des relations extérieures du groupe Fiducial.
Car en effet, repreneurs et cédants ont des approches différentes. L’aspect psychologique est important. Le cédant, qui vend une partie de sa vie et de son travail, qui considère son affaire comme son « bébé », aura une approche plus affective et passionnelle. Il aura tendance à en demander une certaine somme parfois surévaluée. Alors que le repreneur aura une approche plus froide, plus logiquement axée sur le rendement. Il veut payer le » juste prix « , qui lui préservera une marge de financement pour la sécurité et le développement de l’entreprise.
« Très souvent, il y a deux évaluations, chaque partie peut être amenée à discuter les hypothèses retenues jusqu’à ce que les deux courbes se rejoignent et que repreneurs et cédants se mettent d’accord sur un prix », mentionne Frédéric Audin (Axeryss).
« Le prix final pourra être loin de la valeur estimée par les professionnels. Cela dépendra, lors des négociations, si les parties sont pressées ou non », estime de son côté Joël Lopez, expert-comptable chez BLM Conseil. Il arrive que le repreneur soit prêt à payer un peu plus car il a de gros projets à réaliser ou alors au contraire il estime que l’affaire vaut moins que le prix annoncé.
Par exemple, un hôtel qui sur le papier vaut 900 000 euros. Mais il y a des mises aux normes à effectuer et des chambres à moderniser. Le repreneur estime qu’il doit payer moins cher, compte-tenu des coûts futurs, qu’il aura à supporter. Il sera confronté au vendeur, qui lui rechigne à intégrer ces coûts futurs. « Le cabinet d’expert-comptable doit faire comprendre aux parties, qu’il faut intégrer ces coûts, et que le prix doit baisser s’il y a beaucoup de travaux à faire. Mais généralement cela finit par aboutir… », estime Joël Lopez.
Il arrive aussi que le commerçant soit déconnecté de toutes les méthodes, et qu’il dise : « mon affaire vaut tant ». A voir si le repreneur partage le même avis.
En fait, il n’y a pas de règles. Si l’affaire est mise au prix du marché, logiquement elle partira au prix du marché. Si elle est surévaluée, son prix sera négocié. « Tout acquéreur bien conseillé ne devrait pas sur-payer un fonds de commerce », ajoute Frédéric Audin.