Si la situation économique reste difficile pour les commerçants et artisans, certains secteurs tirent leur épingle du jeu et réalisent des performances honorables. Dans un contexte de reprise ou de création, il faudra faire preuve de prudence et ne pas se ruer sur un secteur sous prétexte qu’il est porteur.
L’important sera bien de travailler son projet en amont, et de le faire valider par des experts. En aval, il sera conseillé de mettre en place un certain nombre d’outils pour vérifier l’adéquation entre les réalisations et les prévisions élaborées.
La reprise n’est pas encore vraiment au rendez-vous et la situation économique reste difficile pour les commerçants et artisans. Néanmoins certains secteurs tirent leur épingle du jeu et réalisent des performances honorables. Mais attention dans un contexte de reprise ou de création d’un commerce, il faudra faire preuve de prudence et ne pas se ruer sur un secteur sous prétexte qu’il est porteur. L’entrepreneur devra se poser plusieurs questions : le créneau qui affiche de bons résultats aujourd’hui va-t-il les maintenir demain ? A-t-il la capacité de capter la clientèle pour la rentabiliser ?
Dans ce contexte, l’important sera de bien travailler son projet en amont, et de le faire valider par des experts. En aval, il sera conseillé de mettre en place un certain nombre d’outils pour vérifier l’adéquation entre les réalisations et les prévisions élaborées.
Commerçants et artisans devront mettre en place des stratégies qui leur permettront de continuer à attirer les clients. Et penser à leur développement : après la phase de lancement, ils devront réinvestir, sous peine de voir leur affaire stagner ou décliner.
Si l’on voit apparaître quelques indicateurs encourageants, la situation reste difficile pour les petites entreprises de l’artisanat, du commerce et des services. En 2009, selon la Fédération des centres de gestion agréées (FCGA) leur activité, tous secteurs confondus, a affiché un net recul : -2,5 %. « Sévèrement touchés par la crise économique, les artisans, commerçants et prestataires de services indépendants sont confrontés à de sérieuses difficultés : réduction historique, fonte des carnets de commande, affaiblissement des trésoreries… », analysait alors la FCGA. Même, la traditionnelle locomotive de la croissance des petites entreprises, le secteur du bâtiment, vacillait sur ses fondations avec un recul de -3,7 %.
Le commerce alimentaire
Ce secteur connaît une certaine stabilité avec un score de +0,5 % entre le 3ème trimestre 2010 et 2009. « Ce secteur ressort doucement de la crise, il s’agit d’une reprise timide, en dents de scie, puisqu’il était à -0,4 % sur les 9 premiers mois de l’année 2010 », commente Yves Marmont, vice-président de la FCGA et président de la commission des études économiques. Au sein de cette catégorie du commerce de détail alimentaire, les fruits et légumes ainsi que les vins et spiritueux sont les deux secteurs qui sortent du lot (voir données ci-dessous). Le seul secteur qui enregistre un score négatif est celui de la crémerie.
Evolution d’activités du secteur Commerce alimentaire
Secteurs d’activités
Evolution (en %) sur le 3ème trimestre 2010
Evolution (en %) d’octobre 2010 à septembre 2009
Fruits et légumes
+3
+1,7
Vins et spiritueux
+6,4
+5,9
La culture et les loisirs
Ce secteur résiste également à la crise avec un pic de +4,3% au 3ème trimestre 2010, et un score total de +1,7 % depuis le début de l’année 2010. Néanmoins, il connait de fortes disparités comme le montre les données ci-dessous :
Evolution d’activités du secteur Culture et loisirs
Secteurs d’activités
Evolution (en %) sur le 3ème trimestre 2010
Evolution (en %) sur les 9 premiers mois de 2010
Tabac / journaux et jeux
+6,1
NR
Jouets
+7,1
-0,2
Librairie, papeterie, presse
-5,2
-11,6
Yves Marmont explique la poussée au 3ème trimestre qu’enregistre la catégorie tabac/journaux et jeux: « malgré les hausses de prix, les gens consomment toujours autant de tabac. Quant aux jeux, plus il y a la crise, plus ils jouent, d’autant que l’offre est très vaste». A noter également dans ce secteur que les consommateurs font leurs courses de Noël de plus en plus tôt. Au 3ème trimestre 2010, les jouets ont enregistré une hausse alors qu’ils étaient à – 0,2 % sur les 9 premiers mois de l’année.
Mais il n’y a pas que des heureux dans la catégorie Culture et loisirs, en effet, le secteur libraire-papeterie-presse fait grise mine avec un total de -8,8% sur la totalité de l’année 2010. « Est-ce une tendance due à la montée de l’achat en ligne ? », s’interroge Yves Marmont. Pour l’expert-comptable, cette montée en puissance risque d’entraîner des problèmes pour le commerce de proximité. « Il faudra d’autant plus travailler sur l’accueil, la vitrine pour garder l’attractivité par rapport à Internet», conseille-t-il.
Equipement de la maison
L’équipement de la maison connaît une certaine permanence avec + 0,2 % au 3ème trimestre 2010 et + 0, 5 % sur les 9 premiers de l’année. Voici les données de certaines activités du secteur:
Evolution d’activités du secteur Equipement de la maison
Secteur d’activités
Evolution (en %) sur le 3ème trimestre 2010
Evolution (en %) sur les 9 premiers mois de 2010
Meubles
-4
-0,9
Vaisselle – faïencerie
-9,4
-12,5
Bricolage
+1,6
-4,6
Electroménager, TV, Hifi
+6,7
+13,4
Au sein du secteur, les magasins de meubles sont en baisse, la chute est encore plus rude pour la vaisselle et la faïencerie. De même, les magasins de bricolage ont été à la peine mais avec une légère reprise au 3ème trimestre 2010, « Moins on a d’argent, moins on bricole», constate Yves Marmont. Le seul vrai bénéficiaire est la catégorie électroménager, TV, Hifi, qui affiche des scores à faire pâlir. L’effet « Coupe du Monde » n’y est sans doute pas pour rien dans ces bons résultats !
Equipement de la personne
Quant à l’équipement de la personne, si les chiffres ne sont pas enthousiasmants sur les 9 premiers mois de l’année (+0,3 %), il connait un véritable pic au 3ème trimestre 2010. « Ce secteur connaît une petite reprise car toutes ces catégories enregistrent une hausse lors de cette période », témoigne l’expert-comptable. C’est le cas de la mercerie-lingerie-laine, des vêtements pour enfants, ce qui est logique puisque l’époquecorrespond à la rentrée scolaire, ainsi que du prêt-à-porter et des chaussures (données ci-dessous).
Evolution d’activités du secteur Equipement de la personne
Secteur d’activités
Evolution (en %) sur le 3ème trimestre 2010
Mercerie, lingerie, laine
+12
Vêtement pour enfant
+6,2
Prêt-à-porter
+6,6
Chaussures
+8,6
Quant au secteur des cafés, hôtels, restaurants, il affiche une certaine stabilité : avec +0,2 % au troisième trimestre, + 0,8 % sur les 9 premiers mois de l’année et +0,7 % sur un an.
Pour Yves Marmont : « L’impact de la TVA à 5,5 % n’a pas généré une forte croissance du chiffre d’affaires ». Dans cette catégorie, les cafés souffrent le plus avec des indicateurs négatifs, mais la restauration est stable. Le seul domaine qui connaît une véritable évolution positive est celui de l’hôtellerie de plein air, avec +2,6 % au 3ème trimestre, +2 % sur les 9 premiers mois de l’année et +0,7 % sur un an. Un chiffre que cette profession avait déjà réalisé un an auparavant (d’octobre 2008 à septembre 2009). Des explications avaient été alors avancées : ce mode de vacances, plus économique, attire une clientèle familiale et répond aux attentes des consommateurs dans un contexte économique difficile.
Antoine Majou, président de L’Union des métiers et des industries de l’hôtellerie de Poitou-Charentes (Umih 17) confirme les difficultés rencontrées par les cafés. «Pour les nouveaux entrants, il est conseillé de rejoindre un réseau afin d’éviter de se retrouver seuls, indique-t-il.Il est possible de développer ce type d’établissements en faisant de l’animation ». Comme par exemple : mettre en place des cafés bibliothèques, des cafés culture ou encore des cafés couture. Aujourd’hui, il faut anticiper les tendances et être l’affût des nouveaux concepts.
Pour autant, estime ce professionnel, les métiers de l’hôtellerie et de la restauration restent des secteurs porteurs. Dans le comportement de la population française, le besoin de partir en vacances, d’aller dans les hôtels et les restaurants reste toujours présent. Même si les budgets ont tendance à être réduits, « par précaution », selon Antoine Majou. Pour ceux qui veulent investir dans ces métiers, avant de reprendre un fonds il faudraprocéder à un audit, réalisé par des bureaux de contrôle extérieurs, sur l’outil de travail en lui-même. Cette démarche est particulièrement recommandée pour l’hôtellerie, confrontée aujourd’hui à des problématiques de mise aux normes en matière de sécurité incendie. Cela permettra d’évaluer les besoins en travaux.
Autre conseil : aller voir les confrères dans le même quartier pour procéder à une enquête de voisinage afin de bien apprécier l’activité et le comportement des clients. Enfin, il faudra bien construire son budget prévisionnel et ce, sur l’ensemble de la marche à suivre, et bien sur rechercher toujours le bon emplacement. Avis aux amateurs : « Beaucoup de personnes qui partent à la retraite ne trouvent pas d’acquéreur », déplore Antoine Majou.
Ce n’était pas la période la plus propice pour se lancer et pourtant ils ont tenté l’aventure. Fort de leur expérience de la restauration, Frédéric et Fabienne Barrault ont repris une brasserie il y a un an à Puteaux.
Pour réussir, le couple n’a pas ménagé sa peine. Les deux repreneurs ont d’abord effectué un certain nombre de travaux de mise aux normes, de rénovation et surtout de réaménagement de la terrasse, qui constitue le point fort de l’établissement. Puis ils ont remotivé l’équipe en intégrant de nouveaux collaborateurs. Des nouveautés ont été apportées à la carte et dans les plats proposés. Ils ont pu compter également sur l’accueil de la clientèle, qui leur a tout se suite témoigné son enthousiasme par rapport aux travaux effectués et aux changements réalisés.
La reprise de la brasserie avec une TVA à 5,5 % a constitué sans nul doute un bol d’oxygène. « Cela nous a aidé, c’est indéniable », déclare Fréderic Barrault. Quant au bilan tiré de ces premiers mois d’activité, celui-ci est plutôt confiant « Au début, nous étions juste dans les objectifs, aujourd’hui nous sommes au delà des prévisions », indique-t-il. S’il souhaite d’abord consolider son affaire, le couple ne manque pas de projets, comme par exemple développer la restauration le soir…
Un bel exemple qui prouve que le succès est possible dans un secteur impacté par la crise économique.
Dans le contexte d’une reprise ou d’une création d’un commerce, il faudra faire preuve de prudence et ne pas se ruer sur un secteur sous prétexte qu’il est porteur. « On a pu voir de cinglants échecs dans le domaine du photovoltaïque ou des services à la personne », constate Michel Clément, expert-comptable, directeur de région chez Fiducial à Toulouse.
Il sera bon de ne pas se précipiter, car tout est question de cycle.
Par exemple : lorsqu’un secteur émergeant arrive en phase de maturité, il connaîtra alors une stagnation puis une dépression. « Attention également au phénomène de surcapitalisation », prévient l’expert-comptable. Quand certains secteurs marchent bien, les entreprises ont tendance à vouloir investir ces créneaux, dans ce cas l’offre sera supérieure à la demande et l’on risque de rentrer dans un phénomène dépressif. Le futur commerçant devra se poser plusieurs questions : le secteur annoncé comme aujourd’hui porteur va-t-il le rester dans la durée ? A-t-il la capacité de capter la clientèle pour la rentabiliser ?
En effet, le secteur porteur d’aujourd’hui ne sera pas toujours celui de demain. Pour parer à ces éventualités, l’important sera de travailler en amont pour bien construire son projet.
Au delà de la crise conjoncturelle qu’ils traversent, les commerces se trouvent également confrontés à une modification des normes traditionnelles de distribution, avec la montée en puissance d’Internet et de l’achat en ligne. « Je ne suis pas inquiet outre-mesure, indique Michel Clément, expert-comptable chez Fiducial, directeur de région, basé à Toulouse. Ce secteur, qui en a connu d’autres et qui s’en est toujours sorti, a la capacité de traverser celle-ci ». Voilà pour le contexte. Mais concrètement, quelles dispositions doivent-ils prendre pour traverser cette période ?
Tout d’abord, en cas de reprise d’un fonds de commerce, il faudra être beaucoup plus vigilant sur le montage du dossier financier en amont. « Il est important de procéder à des études de marché, de bien étudier le dossier et d’effectuer des prévisions d’exploitation basées en partie sur les performances réalisées par le commerce que l’on reprend », conseille Michel Clément.
Il sera en outre important de faire valider ces prévisions par des professionnels, qui pourront apporter leur expérience technique.
En aval du projet, il est conseillé de mettre en place un certain nombre d’outils pour vérifier l’adéquation entre les réalisations et les prévisions élaborées. C’est-à-dire un suivi très pointu du chiffre d’affaires, de la marge et des charges d’exploitation. Ces trois éléments doivent permettre de réagir rapidement à un éventuel dérapage « Il faut être beaucoup plus vigilant sur ces éléments car les marchés sont beaucoup plus tendus, quelque soit le créneau », recommande l’expert-comptable.
Attention au danger pour les chefs d’entreprise de penser que la baisse de leur chiffre d’affaires est issue de la crise. « Indépendamment de celle-ci, il peut y avoir des raisons en interne, par exemple un produit qui n’est plus adapté ou une qualité de services qui n’est pas appropriée, comme les horaires d’ouverture ou la qualité du personnel d’accueil », mentionne Michel Clément.
Plutôt que de tout mettre sur le dos de la crise, il faut chercher s’il n y a pas d’autres raisons intrinsèques…
Pour traverser une période économique difficile, les commerçants et artisans doivent mettre en place des stratégies qui leur permettront de continuer à attirer des clients.
Plus que jamais, le point de vente doit être attractif « Il faut innover pour se démarquer » conseille Yves Marmont, vice-président de la Fédération des centres de gestion agréés (FCGA) et président de la commission des études économiques. Que ce soit en termes d’accueil, de présentation et d’aménagement du magasin.
Chaque magasin doit pouvoir trouver, à son niveau, des façons de faire venir le client et c’est là où les commerces de proximité doivent déployer leur sens du commerce. A leur échelle, les bars peuvent le faire aussi, en proposant des animations qui varient de façon régulière.
Exemple
Dans un magasin de prêt-à-porter, il est important d’avoir un renouvellement régulier des produits. Les clientes reviennent si elles savent qu’elles vont trouver des nouveautés tous les 15 jours. Si c’est la même collection qui est présentée pendant plusieurs mois, il y a de fortes chances qu’elles n’y retournent pas.
Dans ce secteur, le commerçant devra pouvoir extrapoler les tendances 6 mois à l’avance lors de l’achat de ses collections, et si possible ne pas se tromper…. « Ces aspects étaient vrais avant, mais la crise a exacerbé les problèmes, qui prennent une importance d’autant plus grande », estime Yves Marmont. «La gestion des stocks est le nerf de la guerre », prévient l’expert-comptable. Toute la difficulté est de trouver le bon dosage. Car le problème est d’avoir un stock qui ne tourne pas ou qui est trop important par rapport à une activité.
On peut citer l’exemple d’un magasin d’accessoires de moto, dont l’existence n’a duré qu’un an. Il proposait 50 modèles de casques, un grand nombre de blousons en cuir. « Ce n’était pas la peine d’avoir tout cela, il avait trop de stocks qui ne tournait pas assez. Mieux vaut avoir une offre bien ciblée», raconte Yves Marmont. Car qui dit stock dit trésorerie, et le seul poste qui mobilise de la trésorerie, c’est le stock. Celui-ci ne doit pas être trop important car il doit- être « vendable ».
Autre conseil prodigué par Yves Marmont : attention à ne pas avoir une boutique trop grande, car il faut qu’elle soit bien remplie. Un magasin plus petit sera plus facilement plein. « Il vaut mieux être petit et pouvoir réagir rapidement, plutôt que d’avoir une grande boutique, dans laquelle il est plus difficile d’intervenir », appuie l’expert-comptable de la FCGA.
En outre, le commerçant devra s’assurer que le local doit être adapté à son activité et à sa zone de chalandise.
Mais comme le résume Michel Clément, pour réussir dans le commerce : il faut aimer le produit que l’on vend et le maîtriser sur un le plan technique. Sans oublier d’avoir une bonne connaissance de sa clientèle.
Pour les commerçants et artisans, la protection de leur patrimoine est en encore plus essentielle en temps de crise. « Choisir le bon statut juridique est important », déclare Michel Clément, expert-comptable Fiducial. Les formules sont adaptées aux différentes circonstances et il convient de se décider en fonction de sa situation personnelle.
Le choix pourra s’effectuer entre 4 statuts : l’entreprise individuelle, la SARL ou l’EURL, l’entreprise individuelle avec déclaration d’insaisissabilité. Cette possibilité, qui date d’il y a 4 ans, permet de mettre à l’abri l’intégralité de son patrimoine foncier ; au départ elle ne concernait que la maison mais elle a été étendue aux biens fonciers. Dernière solution, qui doit être opérationnelle en 2011 : le statut de l’EIRL (Entrepreneur individuel à responsabilité limitée). En matière fiscale, le commerçant ou l’artisan pourra opter pour l’impôt sur le revenu (IR) ou l’impôt sur les sociétés (IS). « C’est une stratégie de crise, ce n’est pas un hasard si ce statut est lancé maintenant », estime Michel Clément.