Pratique plutôt répandue dans certains métiers du commerce et de l'artisanat, le travail en couple peut s'avérer un atout. Mais pour que ce projet fonctionne, il faudra fixer des règles afin que le rôle de chacun soit bien déterminé dès le départ. En outre, il sera indispensable que les deux membres du couple adoptent un statut juridique.
Travailler avec son conjoint est une pratique plutôt répandue dans certains métiers du commerce et de l’artisanat, tels que les commerces alimentaires, les cafés-hôtels-restaurants…Elle pourra se révéler un atout en raison des rythmes de travail et des compétences complémentaires de chacun.
Pour ce que ce projet fonctionne aussi bien sur un plan personnel que professionnel, des règles devront être fixées. Le rôle de chacun, que l’on soit marié ou Pacsé, devra être bien déterminé, et cela dès le départ. De plus, il sera important de maintenir une bonne communication entre les deux membres du couple et dans la mesure du possible, arriver à faire une coupure entre travail et vie privée. Ce qui, de l’aveu des commerçants interrogés, n’est pas toujours facile à mettre en œuvre.
Il est indispensable que les deux membres du couple, en particulier la femme, aient un statut. Une loi votée en 2005 a rendu ce choix obligatoire. Trois options sont possibles : conjoint salarié, conjoint collaborateur et conjoint associé, ceux-ci procurant différents avantages fiscaux et sociaux.
N’hésitez pas à vous faire conseiller avant de vous lancer dans cette passionnante aventure !
Lorsque vous décidez de reprendre un commerce en couple, il faudra fixer un cadre pour que ce projet soit une réussite tant sur un plan professionnel que personnel. Quelques règles sont à mettre en place : transparence, communication, et répartition des missions.
Travailler avec son conjoint est une pratique plutôt répandue dans certains secteurs d’activité du commerce et de l’artisanat. Il est difficile de trouver des chiffres récents sur celle-ci, les dernières données datant de 2005 lors de l’adoption de la loi qui prévoit l’obligation de choisir un statut pour le conjoint. Selon le ministère des PME, près de 65 % de conjoints de chefs d’entreprise commerciales ou artisanales participent en France, à l’activité de l’entreprise familiale. Leur nombre est évalué à près de 950 000 pour une population de 650 000 entrepreneurs commerçants et de 850 000 entrepreneurs artisans. Les conjointes travaillent aux côtés de leur mari entrepreneur, elles tiennent la comptabilité, rédigent les devis, répondent au téléphonent, traitent le courrier et font bien d’autres tâches encore. Il s’agit d’un travail non négligeable, qui serait estimé à 6 heures par jour.
Les conjointes sont présentes dans 51 % des entreprises du bâtiment, 74 % des commerces alimentaires, 35 % des commerces non alimentaires et 61 % des cafés-hôtels-restaurants.
« Effectivement certains types de métiers se prêtent plus que d’autres à être exercés en couple », appuie Mikael Joulain, expert-conseil au sein du groupe Strego. « On retrouve essentiellement les métiers de l’artisanat ou du commerce de proximité : le boulanger aux fourneaux et sa femme au magasin, le chef à la cuisine et madame au service en salle et à la compta. Le tout est d’adapter les postes en fonction de la volonté et de la capacité de chacun. Mais il n’y a pas de règle ! Tout est possible tant que le couple trouve son équilibre », ajoute-t-il.
La décision de travailler en couple se fait souvent de façon naturelle. C’est le cas du Guy Subra, président du groupe de bijouterie le Donjon : « Nous étions tous les deux issus de familles de bijoutiers, nous nous sommes rencontrés dans une école professionnelle. A l’issue de notre mariage, c’est tout naturellement que nous avons décidé de travailler ensemble ». Partis de la région toulousaine, les époux Subra ont développé un groupe, qui compte aujourd’hui 56 magasins en France.
Pour que le couple, – qu’il soit marié, Pacsé ou concubin-, et le commerce fonctionnent de façon satisfaisante, ses membres doivent procéder à une répartition des tâches. Comme en témoigne Guy Subra : « je m’occupe de la gestion, du management, des aspects financiers, des achats, de la gestion des stocks. Ma femme Gabrielle, quant à elle, est en charge de la vente et responsable de la décoration des boutiques ». Cette répartition des rôles s’étant effectuée en fonction de ce qui correspondait le mieux aux compétences de chacun. Sachant qu’il ne peut y avoir de principe en la matière : « j’ai un couple de clients, qui fait du dépannage informatique : ils ont la même fonction dans l’entreprise, ils sont polyvalents et s’entraident : l’entreprise fonctionne très bien », raconte Mikael Joulain (Strego). De façon générale, il semble primordial que le rôle de chacun soit bien déterminé et cela, dès le départ ; par exemple, l’un des conjoints s’occupe de la production et l’autre du magasin.
Autre règle à respecter pour que la reprise d’un commerce en couple soit bénéfique, la communication doit exister entre les deux membres du couple : « même si chacun a son domaine, il faut que chacun agisse en transparence vis-à-vis de l’autre et qu’il y ait beaucoup de communication entre les deux. Mais chacun doit être « le chef » de son secteur », ajoute l’expert-conseil du groupe Strego.
Un avis que partage le bijoutier Guy Subra : « il faut avoir des domaines de compétences complémentaires et savoir communiquer sur tous les sujets. Car il serait trop dommage de ne pas pouvoir profiter de la double compétence » souligne-t-il. En résumé, il ne faut pas se priver de l’expérience de l’autre.
Il arrive parfois que la répartition soit déséquilibrée, si par exemple Madame ou Monsieur ne s’occupe que de la comptabilité mais en contrepartie, il ou elle s’occupe des enfants. « L’essentiel, mentionne Mikael Joulain, est que les conjoints aient confiance l’un en l’autre et que les rôles soient clairement définis pour un bon équilibre de l’entreprise mais aussi du couple ».
Reprendre un commerce en couple peut présenter des avantages dans la gestion de sa vie familiale. Car les époux pourront s’organiser, sans être obligés de respecter des plannings et des horaires comme les salariés. L’un des deux pourra avoir la possibilité d’aller chercher les enfants à l’école ou encore de s’absenter pour un rendez-vous de médecin. Si en théorie, experts et commerçants s’accordent pour dire qu’il faut effectuer une coupure entre vie professionnelle et vie familiale, dans la pratique cela semble beaucoup plus difficile à appliquer. « C’est difficile de séparer les deux, il faut se forcer à lever le pied, à faire un break », reconnait Guy Subra. Même tonalité pour Cécile Lac, qui a repris deux boucheries avec son mari à Montesquieu-Volvestre dans la Haute-Garonne. « C’est très difficile de ne pas parler boulot quand on rentre chez soi. Ce qui me pèse le plus, c’est ne pas arriver à faire la part des choses. Il n’y a jamais de réelle coupure entre les deux », raconte-t-elle. Mais dans cette aventure, il y a aussi des aspects positifs : une bonne collaboration entre les deux époux et une bonne communication. « On se soutient tous les deux : l’un remotive l’autre quand celui-ci baisse les bras », ajoute Cécile Lac.
Pour réussir cette entreprise, quelques conseils sont bons à mettre en pratique : chacun doit avoir des missions différentes, il ne faut pas cloisonner les discussions et les compétences, il faut en profiter pour organiser son temps de la meilleure façon et bien parler des sujets importants. Comme le résume Guy Subra : « le fait de travailler ensemble ne doit pas empêcher d’avoir une vie bien remplie ». Il sait de quoi il parle puisqu’avec son épouse, ils ont élevé quatre enfants, en même temps qu’ils développaient leur groupe. Un bel exemple à méditer : 40 ans après, ils sont tous les deux encore en activité.
Le secret de la réussite passe aussi par l’accompagnement, et là il ne faudra pas hésiter à faire appel à des conseils. Les avocats et notaires pourront intervenir sur le choix du cadre juridique, du régime matrimonial « Il faut de préférence une structure dédiée à l’activité : une société. Il faut à défaut se placer sous le régime de la séparation des biens car le régime de la communauté légale n’est pas adapté aux exigences du commerce », estime Samuel Guillaume, avocat spécialiste en baux commerciaux et baux professionnels.
Il est recommandé de se faire conseiller en amont, même si cela a un coût. Et Samuel Guillaume de citer un exemple : un de ses clients exploitait son fonds de commerce dans un immeuble commun aux deux époux (ou dans un bien appartenant en bien propre à son épouse) : aucun bail n’avait pas signé, comme c’est souvent le cas. Il s’est vu attribuer le fonds de commerce sans pouvoir cependant imposer la conclusion d’un bail au propriétaire de l’immeuble, ni revendiquer le bénéfice du statut des baux commerciaux.
Autre exemple à connaître en matière de congé : lorsqu’on exploite un commerce en couple, celui-ci doit être délivré au nom de chacun, le congé d’un seul ne pouvant suffire à mettre fin au contrat à l’égard des autres copreneurs. Une précision importante, et qui peut éviter des déboires ultérieurs.
Les experts-comptables pourront étudier les comptes, en particulier le prévisionnel. Plus ces spécialistes entretiennent un contact étroit avec le couple, mieux cela sera, notamment pour mettre en garde le chef d’entreprise et l’aider à se parer des difficultés avant qu’elles ne deviennent insurmontables. D’autres partenaires peuvent également être consultés, comme les banquiers ou les assureurs.
Les experts pourront aussi conseiller les époux lors du choix du statut du conjoint, obligatoire depuis la loi du 2 août 2005. Trois options sont alors possibles : celui de conjoint collaborateur, celui de conjoint salarié et celui de conjoint associé. Ces 3 situations procurant des avantages fiscaux et sociaux très différents. Il sera alors important de prendre la bonne direction pour mieux se lancer dans cette passionnante aventure humaine.
Après avoir repris une Maison de la presse à l’Ile de Ré (voir parcours de repreneur) , les époux Boucher poursuivent leur aventure en duo avec le rachat du Grand Hôtel des Bains, à Fouras, en Charente-Maritime. Gilles a passé 20 ans à la tête d’entreprises du secteur agroalimentaire, tandis que Marie, son épouse, possède un DESS de gestion, ce qui leur confère une certaine crédibilité auprès des banques. Si la gestion des 2 librairies, -ils en avaient repris une deuxième à Saint-Martin de Ré-, était très contraignante, ils souhaitaient avoir une activité, qui leur laisse plus de temps pour eux. Ce qui est désormais possible, l’hôtel fermant ses portes de novembre à mars.
Avec leur expérience de la Maison de la presse, les époux Boucher ont appris à s’organiser. « C’est important d’avoir appris à le faire car il faut savoir s’arrêter. A la Maison de la presse, nous avions responsabilisé les salariés pour qu’ils puissent tenir la boutique », raconte Gilles Boucher. Pour lui, c’est important de savoir déléguer et de ne pas devenir totalement indispensable. « J’ai bien travaillé ce point dans l’industrie, j’étais là en tant que chef d’orchestre », raconte-t-il.
Dans le cadre du Grand Hôtel des Bains, les tâches sont bien réparties. Gilles s’occupe des petits-déjeuners, de la gestion du personnel, des relations extérieures, tandis que Marie est en charge de la réception des clients, de leur départ et de la partie administration, gestion, comptabilité. Une organisation sans faille pour mieux répondre aux demandes de leur clientèle !
Il est important que les deux membres du couple, en particulier la femme, aient chacun un statut et les droits qui vont avec. Une loi votée en 2005 a rendu ce choix obligatoire. Se faire aider par des experts sera conseillé lors de cette décision. Pendant longtemps, les femmes qui travaillaient avec leur mari n’avaient pas de statut, ni de reconnaissance, donc ni retraite, ni formation, ni protection sociale…Pour remédier à cette situation, un premier texte de loi en 1982 a instauré 3 statuts , -conjoint collaborateur, conjoint associé, conjoint salarié-, ce qui a permis la reconnaissance du travail effectué par ces femmes. C’est surtout la loi du 2 août 2005, suivie du décret du 1er août 2006, qui a marqué un tournant, avec l’obligation de choisir un statut et l’obligation de cotiser des droits personnels à la caisse de retraite. « La loi de 2005 a été une bonne loi, qui a apporté de grandes améliorations au niveau social, juridique, professionnel, patrimonial », estime Annie Deudé, présidente de la fédération nationale Actif (Association de conjoints de travailleurs indépendants de France-Commerce, artisanat, services), qui milite auprès des institutions pour la reconnaissance et les droits de cette catégorie.
A noter que depuis la loi de modernisation de l’économie (LME) du 4 août 2008, les personnes liées par un Pacs au chef d’entreprise bénéficient également de ces dispositions.
Alors comment faire son choix entre ces différents statuts ? « Tout dépend de la protection que chacun souhaite », souligne Mikael Joulain, expert-conseil chez Strego.
Première option : le conjoint peut être salarié, ce qui implique qu’il soit lié par un contrat de travail pour exercer sous l’autorité du chef d’entreprise (lien de subordination) de façon effective et habituelle, en percevant un salaire horaire normal dans sa catégorie professionnelle, au moins égal au SMIC.
« C’est ce statut qui est choisi le plus souvent, indique Annie Deudé, sans doute parce que le conjoint pense que c’est celui qui est le plus protecteur ». « Mais attention, si vous travaillez à mi-temps, ou à temps partiel, au niveau de la retraite, ce sera aussi du mi-temps ou du temps partiel », prévient-elle. Ce statut ouvre droit normalement à l’assurance chômage. « Attention, prévient également Annie Deudé, le conjoint n’est pas assuré d’avoir des indemnités chômage, il faut qu’il ait l’accord de Pôle Emploi ». Pour cela, il devra établir un dossier auprès de l’organisme pour vérifier et garantir sa prise en charge.
Deuxième option : le conjoint collaborateur, qui s’adresse au conjoint ou à la personne liée par un pacs au chef d’entreprise exerçant une activité professionnelle effective et habituelle dans l’entreprise, sans percevoir de rémunération. « Psychologiquement, cet élément peut bloquer certains ou certaines. Même si ce statut présente de réels atouts », estime Mikael Joulain (Strego). En effet, il est ouvert au conjoint, qui a une autre activité professionnelle salariée à temps partiel. « Son intérêt, c’est que le conjoint bénéficie d’un mandat d’administration mais sans s’engager personnellement, l’époux commerçant étant seul obligé au passif », précise Samuel Guillaume, avocat spécialiste en baux commerciaux et baux professionnels.
Troisième option : le conjoint associé. Les époux peuvent s’associer, seuls ou avec d’autres, en pouvant n’apporter que des biens de communauté, dans toutes formes de société. « Lorsqu’il s’agit d’exploiter un fonds de commerce, le conjoint peut apporter son industrie lorsque son activité est liée à l’activité exercée », souligne l’avocat. « Un époux peut revendiquer la qualité d’associé quand son conjoint fonde une société par apport total ou partiel de biens communs. La revendication peut se faire même au cours d’une procédure de divorce jusqu’à ce qu’une décision définitive soit rendue », ajoute Samuel Guillaume. L’intérêt, c’est que la qualité d’associé permet au conjoint de profiter pleinement des droits de ce statut.
Comme le résume Mikael Joulain (Strego) : « le statut se détermine à la fois en fonction de la volonté de chacun de se protéger et en fonction du niveau de revenus qui sera dégagé. Mais là, il faut regarder au cas par cas »
Pour faire son choix, il faudra prendre en compte le régime matrimonial, à qui appartient l’entreprise …et aussi le fait qu’un jour, les conjoints peuvent se séparer. « Si on est en séparation de biens, que l’entreprise appartient à l’époux, il faut tabler sur le salariat », estime Annie Deudé (fédération Actif).
Pour prendre sa décision, les commerçants et les artisans devront se renseigner auprès des Chambres de commerce et d’industrie, des chambres de métiers, des experts-comptables ou encore des auprès de professions juridiques (avocats, notaires…)
Même si la situation a évolué depuis l’adoption de la loi de 2005, il reste encore un certain nombre de points à améliorer. « Il y a encore beaucoup de choses à faire au niveau de l’information et du conseil sur ces dispositions, un grand nombre de personnes ne les connaissent pas suffisamment bien », constate Annie Deudé. Du pain sur la planche pour les spécialistes du commerce…
Rien ne prédisposait Cécile Lac, résidant à Montesquieu-Volvestre en Haute-Garonne, à recevoir le prix « Madame Commerce de France », des mains du secrétaire d’Etat au commerce et à l’artisanat, Frédéric Lefebvre. Sa candidature ayant été proposée par l’Association Actif 31.
Mère de deux enfants, elle débute son parcours professionnel comme aide médico-psychologique, puis rejoint son mari, éleveur, lorsqu’il décide de reprendre une boucherie il y a 8 ans, puis une deuxième quelque temps plus tard. Son mari s’occupe de la première boucherie et Cécile Lac, qui s’est lancée dans une activité traiteur, a la responsabilité de la deuxième. « Nous travaillons ensemble mais chacun a son territoire », explique t-elle. Tous les deux sont associés et gérants de la SARL, qui coiffe ces activités, « La Carbonnaise des Viandes » pour la partie boucherie et « les Délices de Marlène » pour la partie traiteur.