La reprise d'un fonds va comporter plusieurs étapes. Tout d'abord, le choix de l'établissement, qui se fera après l'étude de plusieurs éléments : l'emplacement, le bail commercial,l'équipe en place...
Il faudra ensuite bâtir un plan de financement, et faire accepter votre dossier par le banquier. A vous de jouer !
Vous souhaitez devenir commerçant ? La reprise d’un fonds présente plusieurs avantages par rapport à une création. Celle d’acquérir une activité qui fonctionne déjà dans un local aménagé avec une clientèle constituée, une équipe en place, des fournisseurs, plus un bilan chiffré sur les trois dernières années. Pour toutes ces raisons, la reprise sera susceptible d’être financée plus facilement par les banques, qui pourront s’appuyer sur cette base pour prendre leur décision. Pour faire le bon choix, vous devrez passer en revue un certain nombre d’éléments, tels que l’emplacement, primordial pour la bonne marche de votre commerce, l’état général du fonds : est-il bien entretenu, y a-t-il des travaux à effectuer ? Sans oublier les salariés, qui seront repris automatiquement. Pour réaliser cette opération, vous devez disposer de capitaux propres, signe de votre implication dans le projet. Il sera possible de compléter cet apport par différentes aides et prêts d’honneur, l’emprunt bancaire finançant le reste des besoins. Etre commerçant ne s’improvise pas. Dans la mesure du possible, il sera conseillé de reprendre une activité que vous connaissez déjà.
Pour bien choisir un fonds, vous devrez prendre en compte un certain nombre de critères : l’emplacement, l’état des locaux, l’équipe en place. Sans oublier une sérieuse vérification du bail commercial, qui va régir votre activité. La reprise d’un fonds de commerce est une opération complexe, qui se déroule en plusieurs phases : le choix de la bonne affaire et sur quels critères se baser, son évaluation, le montage du plan de financement jusqu’à la rédaction de l’acte de cession… Mais en premier lieu, le porteur de projet doit se pencher sur les modalités de l’ouverture de son commerce. Doit-il reprendre un fonds de commerce plutôt que d’en créer un ? La reprise va comporter plusieurs avantages. Tout d’abord, elle permet de ne pas partir de zéro, par l’acquisition d’une activité qui fonctionne sur un lieu déjà loué, aménagé, qui possède une clientèle déjà constituée, des fournisseurs, du personnel… « C’est une façon de reprendre une activité « clé en mains », en pouvant analyser ses atouts et ses défaillances, ce qui sera à corriger ou à améliorer une fois l’acquisition réalisée, c’est-à-dire préparer l’avenir sur la base d’éléments objectifs », estime Christine Martin, avocat associé au cabinet lillois Vivaldi Avocats. Il sera possible de s’appuyer sur cette base pour réaliser un business plan.
« Mais attention : il faudra justement s’assurer que l’organisation mise en place n’est pas inadaptée parce que trop lourde en process et/ou en coût », tempère Mélanie Tisserand Le Guilloux, expert-comptable au cabinet EMS Audit.
Autre aspect favorable : la reprise d’un fonds de commerce sera finançable plus facilement par les banques en raison de l’activité qu’elles peuvent appréhender. Reprendre permet également de pouvoir bénéficier de l’accompagnement du cédant, qui va transmettre sa compétence, l’histoire du fonds, et ses spécificités. Il pourra également présenter le nouveau dirigeant aux clients et aux fournisseurs, ce qui permet de faire une transition en douceur.
Alors que créer suppose une prospection, un lieu à choisir, pour lequel il va falloir prendre un bail. Puis il s’agira d’installer ce local, investir dans du matériel si besoin. Il faudra ensuite trouver une clientèle et la garder, rassurer les fournisseurs. « C’est un démarrage à zéro avec l’incertitude que cela comporte (ai-je fait les bons choix ?) et un financement beaucoup plus difficile par les banques », compète Christine Martin.
Avant de porter son choix sur une affaire, il est conseillé de faire un cahier des charges en amont pour définir l’entreprise idéale en fonction de son profil afin de vérifier qu’il y a une bonne adéquation entre la personne et le projet.
« On peut avoir un coup de cœur pour une affaire mais à condition qu’il rentre dans ce cadre », souligne Gregory Retz, directeur d’Initiative Clé, réseau d’accompagnement lillois. « D’où l’intérêt de se projeter sur l’affaire idéale avant d’avoir trouvé l’affaire réelle », suggère-t-il. De même, avant de se lancer dans l’aventure, le repreneur devra prendre le temps de se renseigner sur l’environnement dans lequel évolue l’affaire convoitée. De regarder l’univers de la concurrence. Par exemple, s’il veut créer un restaurant avec un menu à 15 euros et que tous les établissements du quartier en proposent un à 14, cela risque d’être problématique…. Autre conseil : aller faire un tour à la Mairie et consulter le P.L.U (Plan local d’urbanisme) pour voir quelles sont les modifications à venir. S’il y a des travaux, des changements de circulation, une mise en service d’un tramway, ou bien l’ouverture prochaine d’un concurrent…. « Les travaux peuvent faire grossir ou au contraire faire chuter le chiffre d’affaires », estime Gregory Retz (Initiative Clé). A titre d’exemple : un commerçant avait repris en location-gérance un restaurant sur une place avec une belle terrasse. Manque de chance : 4 ans de travaux ont nui à la fréquentation de l’établissement et entamé les chiffres. Le gérant n’avait pas pris conscience que ceux-ci seraient aussi longs et pénalisants. Et l’histoire s’est (malheureusement) terminée par un dépôt de bilan. Pour éviter ce genre de mésaventure, il est également conseillé de se renseigner auprès de l’association locale des commerçants, généralement bien informée des projets en cours.
Pour bien choisir son fonds, un certain nombre de critères sont à prendre en compte. Selon l’adage bien connu : 1) l’emplacement, 2) l’emplacement, 3) l’emplacement. Celui-ci est primordial pour installer son commerce. C’est principalement le lieu géographique, qui va attirer la clientèle. Le repreneur devra faire attention à l’attractivité, aux facilités d’accès et de stationnement. Il devra aussi se pencher sur l’état général du fonds : est-il implanté dans un lieu qui a été bien entretenu ? Ce qui conduit à l’examen des clauses et conditions du bail commercial, notamment en ce qui concerne les clauses de travaux. « Il faut savoir que la majeure partie des baux commerciaux mettent à la charge du preneur (c’est-à-dire du locataire) l’ensemble des travaux sur le bien : notamment les grosses réparations de l’article 606 du Code Civil », indique l’avocate Christine Martin. Si l’immeuble où le fonds est installé n’a pas été bien entretenu, le repreneur risque de se retrouver à devoir effectuer des travaux, avec le surcoût que cela engendre. « Les relations avec le bailleur sont également importantes : certains interprètent les clauses des baux commerciaux de manière si restrictive qu’il sera difficile de trouver un terrain d’entente lorsque les travaux se révèleront nécessaires », ajoute l’avocate. Lors de la reprise d’un fonds, la loi impose à l’acquéreur de reprendre les salariés qui travaillent dans celui-ci. « Il faut donc impérativement se faire communiquer, avant la signature de quelque document que ce soi, les contrat de travail et les fiches de paie. Il est important de vérifier l’ancienneté ainsi que les différents avantages qui ont pu être octroyés aux salariés », conseille Monique Ben Soussen, avocate, créateur du cabinet BSM. Dans ce contexte, le repreneur doit en effet maintenir aux salariés les mêmes conditions que celles qui étaient les leur avant la cession. Il ne peut donc pas exiger du cédant qu’il licencie le personnel, qu’il ne souhaite pas reprendre dans le cadre de la cession. Ce sont des cas de figure qui ont pu se produire notamment lorsqu’il s’agit d’établir un prévisionnel pour le dossier de prêt bancaire. Le repreneur risque que sa responsabilité soit engagée, tout comme celle du cédant, en cas de constatation par un salarié de son licenciement intervenu avant la cession.
D’autres aspects juridiques sont à connaître lors des cessions de droit au bail et/ou de fonds de commerce. Celles-ci vont être soumises à un droit de préemption pour les communes ayant instauré un périmètre de sauvegarde du commerce et de l’artisanat. « Cette disposition, entrée en vigueur le 27 décembre 2007, permet d’éviter que le centre-ville ne soit envahi par des banques et assurances », commente Christine Martin. Donc, toute cession doit être précédée d’une demande en mairie pour savoir si ce périmètre a été instauré sur la commune où le fonds est implanté. La mairie dispose alors d’un délai de 2 mois pour savoir si elle préempte ou pas le fonds en question. Si cette disposition existe dans les textes, il semble qu’elle soit peu mise en pratique dans les faits, car elle génère d’autres problèmes juridiques. Enfin, il faut savoir qu’un certain nombre de mentions obligatoires doivent figurer dans l’acte de cession. C’est-à-dire l’origine de propriété, l’état des inscriptions de privilèges et nantissement grevant le fonds, les chiffres d’affaires et bénéfices des 3 derniers exercices, plus le relevé des chiffres d’affaires mensuels entre le début de l’exercice en cours jusqu’au mois précédant la session, les charges et conditions du bail. A noter qu’une loi du 22 mars 2012 relative à la simplification du droit et à l’allègement des démarches administratives a modifié les informations devant être fournies lors de la vente d’un fonds. « Cette nouvelle loi est plus exigeante et contraint le cédant à fournir les résultats d’exploitation réalisés. Le résultat d’exploitation est une information plus précise car il exclut les bénéfices exceptionnels ainsi que les gains financiers », commente Monique Ben Soussen. Cette information doit être fournie sur les 3 dernières années d’activité. Le résultat d’exploitation stricto sensu permet d’avoir une vision plus exacte de la rentabilité du fonds. Un dernier conseil avant de se lancer dans cette opération : il faut prendre son temps pour peaufiner son projet et ne pas se décider sur un coup de tête. Et aussi, dans la mesure du possible reprendre une activité que l’on connaît déjà. Un argument de poids auquel sera sensible le banquier.
La lecture du bail doit se faire avec une attention particulièrement soutenue. « Il faut être très vigilant par rapport à la rédaction du bail, en particulier à la clause concernant les activités autorisées. Il est important de vérifier que l’objet autorisé est suffisamment large pour permettre non seulement l’exploitation prévue mais aussi une éventuelle revente », indique Monique Ben Soussen, avocat, créateur du cabinet BSM. D’où l’importance de bien étudier ce document avant de le signer, car après les parties seront engagés pour 9 ans. Les baux commerciaux sont en effet conclus pour cette durée mais avec des possibilités de révision triennale. Autre point à vérifier : la conformité du local avec l’activité que l’on veut exercer. C’est notamment le cas pour les activités alimentaires, la restauration. Il convient également de vérifier la superficie du local, et son accessibilité au public. Quant aux agencements, il est indispensable d’établir un inventaire détaillé de ceux qui sont cédés dans le cadre de la cession. Seuls ceux qui sont précisément listés dans cet inventaire devront se trouver dans le fonds le jour de la vente. Pour toutes ces raisons, le locataire aura tout intérêt à faire relire le bail commercial par un professionnel du droit, afin d’éviter déconvenues et mauvaises surprises.
Preuve de son implication, l’acquéreur du fonds devra fournir un apport personnel, qui va varier selon les secteurs. Outre le prêt bancaire, d’autres types de financement viendront compléter le dispositif.
Une fois que vous avez repéré une affaire qui correspond à ce que vous recherchez, il va falloir élaborer un plan de financement. « L’erreur la plus courante est de considérer que le cédant était en roue libre, et que les chiffres annoncés sont faciles à réaliser », estime Grégory Retz, directeur du réseau d’accompagnement lillois Initiative Clé. Ce qui signifie qu’il ne faut jamais sous-estimer le cédant et penser que l’on va facilement multiplier le chiffre d’affaires par 2. Il faut plutôt rester sur une stabilité, et s’appuyer sur les chiffres réalisés précédemment. S’il est indispensable d’avoir une stratégie de développement, d’évolution, il ne faut pas tout changer tout de suite, au risque de perdre salariés et clients. « Il s’agit de trouver un juste équilibre entre la tradition et l’évolution », ajoute Grégory Retz. La reprise d’un commerce a un coût et sans apport, cela risque d’être compliqué voire impossible. « Généralement, entre 20 et 30 % du prix d’acquisition doit être apporté par le porteur de projet », indique Gaylord Graveleau, gérant d’Intrasaction, une structure du groupe Strego, dédiée à la cession et acquisition de commerces et petites affaires artisanales. Le reste de la somme sera financé par l’emprunt bancaire, qui couvre 60 à 70 % des besoins, mais ceux-ci peuvent varier selon la qualité du projet et du repreneur. Généralement, les banques prêtent à des personnes issues du métier (voir Questions à…p18), qui ont déjà une première expérience, c’est notamment le cas pour les coiffeurs, ou les commerces alimentaires comme les boulangers. « Si l’on reprend un magasin de fleurs, c’est mieux d’avoir déjà de l’expérience, en termes de gestion, de traitement du stock, sinon il risque de se produire des problèmes de marge », ajoute Gaylord Graveleau. D’autant que les repreneurs improvisés risquent de se casser les dents face aux salariés, qui peuvent le prendre en otage du fait de sa méconnaissance du business. Autre point important : il faut s’assurer que le remboursement des fonds empruntés laissera à son repreneur de quoi vivre.
Aujourd’hui dans un contexte économique difficile, est-il plus difficile de se faire financer ? Les experts de la reprise constatent une tendance à l’augmentation des exigences en termes de fonds propres. C’est le cas pour les secteurs, qui sont le plus impactés par la crise. Par exemple pour la restauration, qui connaît des difficultés, les banques vont demander plutôt 50 % d’apport. « Actuellement, les banques demandent des apports personnels assez importants, ce qui représente souvent un problème », estime Christine Martin, avocat associé au cabinet Vivaldi. « Si les projets sont sérieux, ils seront financés », tempère le gérant d’Itransaction. Lorsque la valorisation est cohérente, que le repreneur possède une solide expérience, qu’il a de l’apport et que le prévisionnel tient la route, il n’y a pas de raison que le projet ne soit pas financé. D’autres types de financement peuvent compléter le dispositif comme le prêt à la création d’entreprise accordé par Oséo, des prêts d’honneur délivrés par des plates-formes comme France Initiative ou Réseau Entreprendre…L’intérêt de ceux-ci est qu’ils ont souvent un effet levier de 8,2. Plus concrètement, pour 1 euro accordé en prêt d’honneur, on aura un prêt de 8,2 euros de la banque. Ces prêts rassurent le banquier, car ils signifient que le porteur de projet est aidé par des experts et qu’il a déjà bien « planché » sur son dossier. Le repreneur peut également trouver auprès de l’Etat et des collectivités des aides et subventions, comme le dispositif Nacre, qui s’adresse aux personnes sans emploi. La formule du crédit vendeur peut également être utilisée. Selon le contexte, la confiance établie entre les parties et la situation patrimoniale du cédant, il est possible de négocier avec ce dernier le paiement échelonné sur plusieurs années d’une partie du prix du fonds cédé. Lorsque les banques vont prêter à un repreneur, elles vont généralement exiger des garanties. Il peut s’agir de garanties sur les biens financés, comme le nantissement du fonds de commerce ou bien des cautions personnelles. A savoir que certains organismes (fonds de garantie, comme Oséo ou sociétés de caution mutuelle) peuvent prendre en charge partiellement le risque avec la banque. Celle-ci a besoin d’être rassurée et les cautions constituent un bon thermomètre du degré des risques. Plus le secteur est risqué, plus les garanties demandées seront importantes… Dernier conseil : pour remporter l’adhésion du banquier, le repreneur devra présenter un dossier clair et précis et montrer qu’il maîtrise bien l’ensemble de ses éléments.
Comment donner une valeur à une affaire ? Différentes méthodes existent. La plus connue est celle qui consiste à appliquer un pourcentage sur le chiffre d’affaires. « Un peu ancienne, elle commence à tomber en désuétude. Aujourd’hui, ce qui fait la valeur d’un fonds de commerce, c’est sa rentabilité », estime Gaylord Graveleau, gérant d’Itransaction, une structure du groupe Strego dédiée à la cession et acquisition de commerce et petites affaires artisanales. Par cette méthode, il s’agit d’aboutir à un excédent brut d’exploitation retraité multiplié par un coefficient entre 3 et 4, ce qui donne une valorisation économique de l’entreprise. Il faut également prendre en compte les valeurs du marché, c’est-à-dire les transactions récentes comparables (par une recherche dans la presse spécialisée ou auprès des syndicats professionnels). « Idéalement, il faut faire évaluer l’entreprise par un expert-comptable, et ne pas prendre celui du vendeur », conseille Mélanie Tisserand Le Guilloux, expert-comptable au cabinet EMS Audit. L’évaluation va servir à fixer un prix de départ mais il ne faut pas oublier que le prix résulte avant tout de la rencontre entre l’offre et la demande, qui va varier selon les secteurs d’activité. C’est bien la loi du marché qui va s’appliquer.