Evaluer un débit de tabac

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Evaluer un débit de tabac
La libre circulation du tabac en Europe, de plus en plus taxé en France, place les débits de tabac français en difficulté dans certains départements, notamment frontaliers. Mais l’essentiel pour la pérennité de ce type de fonds de commerce réside dans sa diversification et sa modernisation… Il convient d'y réfléchir en amont d’une évaluation avant cession.

Comme le prévoit le budget de la Sécurité sociale voté à l’automne 2017, la fiscalité du tabac  augmentera en cinq étapes, jusqu’à voir affichés les paquets de cigarettes au prix de 10€ avant fin 2020[1]. La Confédération nationale des buralistes craint d’ici là que contrebande et achats frontaliers précipitent le nombre de fermetures prématurées[2].  Le revenu des buralistes a pourtant globalement augmenté entre 2012 et 2015 et certaines situations seraient florissantes, d’après le rapport de la Cour des comptes publié début 2017. Ce document, liant la disparité des situations à une insuffisante prise en compte des besoins réels des débits en difficulté, recommandait de mieux cibler les dispositifs de soutien public pour inciter à plus de diversification.

Dans le même temps, la publication des données de l’Observatoire Fiducial 2016 « Marchands de presse »,-étude réalisée sur 400 points de vente sélectionnés parmi les clients du groupe, www.fiducial.fr/tabac-presse-,  indiquait que 83% d’en eux développaient l’activité complémentaire de débit de tabac pour contrer l’impact de la crise pour beaucoup liée à la transition digitale.
Diversification, modernisation à la clé, doivent donc être décidées en stratège pour valoriser son fonds.

Soutiens à la diversification et à la modernisation


Soutien à la diversification d’activités – Le décret du 4 août 2017 instaure une prime annuelle de diversification des activités d’un montant de 2.000 euros pour les débits de tabac.
Pour cela, trois conditions d’éligibilité doivent être remplies. Primo : réaliser un chiffre d’affaires annuel de moins de 300.000 euros. Secundo : justifier d’une implantation dans une commune de moins de 2.000 habitants ou dans un département frontalier[3], sinon en difficulté[4], ou encore dans un quartier prioritaire. Tertio : proposer au moins cinq de la quinzaine de produits ou services de la liste du décret, pour beaucoup associés plus ou moins directement aux services à la personne et aux recettes de l’Etat[5].


Chiffres clés sur 2015 et 2016 (source : www.buralistes.fr) :
  • Valorisation des livraisons tabac : 17,98 milliards d’euros
  • Recettes fiscales (TVA incluse) : 14,2 milliards d’euros
  • Jeux de la Française des Jeux 2016 : 10,48 milliards d’euros, les buralistes représentant 76 % du chiffre d’affaires global de la Française des Jeux
  • PMU 2015 : 3,5 milliards d’euros (soit 45 % du chiffre d’affaires global du PMU) en 2015

Aide à  la modernisation des débits de tabac ordinaires : 25% du montant total des dépenses engagées – En principe plafonnée à 10.000 euros, l’aide versée en une ou plusieurs fois est dédiée au financement d’investissement en matériel, équipements et travaux pour modernisation visible ; soit a minima 4.000 euros HT d’investissement, dont 2.000 euros HT au moins dans l’acquisition de matériels et équipements, la liste des éléments éligibles étant précisée dans l’arrêté du 28 avril 2017. Le plafond initial peut être porté à 20.000 euros en cas de transfert au sein du département ou dans un département limitrophe, le changement de gérant n’ayant pas d’incidences sur le plafond. La demande adressée au Bureau des contributions indirectes est accompagnée du projet, de deux devis au moins et de factures déjà acquittées.

Pour rentabiliser l’investissement, et donc optimiser la valorisation qui indiquera la valeur marchande future du fonds, diversification et modernisation comptent dans la rentabilité du fonds, fonction de son endettement, comme l’emplacement, la nature de la clientèle, l’amplitude des horaires d’ouverture et les conditions du bail – avec ou sans possibilité de logement. Autant d’éléments à anticiper deux ans au moins avant cession, le temps de prendre les mesures s’imposant et d’en mesurer les effets.

Méthodes d’évaluation en usage dans la profession

L’objectif n’est pas de déterminer le prix de cession mais de fixer la fourchette dans  laquelle cédant et repreneur négocieront.  La profession a pour usage, rappelle la Maison des buralistes, de privilégier deux méthodes d’évaluation : celle dite des Editions Francis Lefebvre ou celle de l’Excédent Brut d’Exploitation (EBE).

Méthode dite des Editions Francis Lefebvre – L’évaluation se fait en pourcentage du chiffre d’affaires réalisé et défini par secteurs d’activité : les critères sont additionnés activité par activité. Ainsi, selon le Mémento fiscal 2016 de ce même éditeur,  fallait-t-il compter :
  • Pour un café-tabac, 2 à 4 ans de remise nette tabac ;
  • Pour un tabac-presse avec tabletterie, 80 à 160% du chiffre d’affaires TTC annuel.
Simple, facile de calcul et adaptée au commerce, cette méthode a l’inconvénient de fixer une fourchette sans rapport avec la rentabilité du fonds, critère que privilégie le repreneur, le plus souvent soumis à la pression financière du remboursement d’un prêt.

Méthode de l’excédent Brut d’Exploitation (EBE), de plus en plus courante pour prendre en compte la rentabilité  – Faire dresser un état financier de l’entreprise permet d’apprécier le caractère normal ou non de certains postes pour correction éventuelle, avant d’appliquer le ratio de rentabilité déterminé chaque année (EBE) alors retraité par application d’un coefficient de 1 à 10. Un coefficient proche de 1 s’applique à un environnement fragile, un environnement plutôt bon, monopolistique par exemple, pouvant se voir appliqué un coefficient proche de 5. En 2012, et selon les critères de l’environnement du buraliste, la Maison des buralistes retenait de 2 à 4,5 fois l’EBE.
Seul, en fait, un diagnostic préalable précis des points forts et perfectibles des conditions de l’activité exercée permet d’approcher un multiple objectif.

Cela, sans oublier l’humain : l’équipe et la personnalité du dirigeant sont-elles ou non dissociable du fonds ?  Il est encore possible de doubler cette méthode d’une évaluation du droit au bail, auquel cas la valeur du fonds de commerce correspond à la somme de ces deux données avec un EBE valorisé selon un coefficient de 3 à 5.
 
A savoir

 –  Le cédant partant en retraite peut préférer vendre les parts de la société, après anticipation du coût fiscal de la plus-value de cession pour le repreneur, lequel reprend la société en l’état – créances, dettes, contrats en cours et tout autre engagement – ainsi que le stock, exclu de la reprise du fonds.

 – Faute de repreneur, un débitant de tabac peut solliciter une indemnité de fin d’activité classique ou rurale (IFA) supposant, conformément au décret du 10 mai 2017, une baisse d’au moins 20% du montant annuel des livraisons de tabacs sur l’année précédant la demande par rapport à l’année de référence – 2002 pour une entrée en fonction avant le 1er janvier 2002, sinon l’année suivant celle de l’entrée en fonction.

Contacts utiles :
 


                                                                                      Créée par Sub Verbo le 8 novembre 2017
 
[1] La hausse, en France, de la fiscalité sur le prix du tabac sera répercutée par les fabricants et fera augmenter le paquet de un euro en mars 2018, de puis de 50 centimes en avril et en novembre 2019 et, enfin, de 50 centimes en avril 2020 avant les 40 centimes de plus en novembre 2020. La Corse connaîtra également un relèvement plus soutenu de la fiscalité du tabac pour amorcer la convergence avec le continent, totale d’ici 2021. Pour compenser le manque à gagner induit les débitants bénéficient d’un taux de remise sur les prix de vente. La rémunération par remise directement versée sur facture par le fournisseur est de 7,5%.
 
[2] Une remise compensatoire mobilisable jusqu’au 31 décembre 2021 – soit 70% de la perte de remise nette, dans la limite de 30.000 euros annuels par débits, est versée depuis le 1er janvier 2017 aux débitants entrés en fonction avant le 31 décembre 2015 et qui, du fait de leur situation géographique – 22 départements frontaliers et 12 départements en difficulté visés par arrêté du 19 avril 2017 –  ont subi une perte de chiffre d’affaires annuel d’au moins 5% par rapport à 2012. En sont exclus  les débits avec successeur, les débits sans livraison sur 4 mois d’une même année, ou bien fermés provisoirement ou temporairement.
 
[3] Ain ; Aisne ; Alpes-de-Haute-Provence ; Hautes-Alpes ; Alpes-Maritimes ; Ardennes ; Ariège ; Doubs ; Haute-Garonne ; Jura ; Meurthe-et-Moselle ; Meuse ; Moselle ; Nord ; Pyrénées Atlantiques ; Hautes-Pyrénées ; Pyrénées orientales ; Bas-Rhin ; Haut-Rhin ; Savoie ; Haute-Savoie ; Territoire de Belfort.
 
[4] Aisne ; Ardennes ; Marne ; Haute-Savoie ; Meuse ; Moselle ; Nord ; Pas-de-Calais ; Bas-Rhin ; Haut-Rhin ; Somme ; Vosges.
 
[5] Liste des produits et services pour prétendre à la prime à la diversification des activités : délivrance de timbres postaux sous format papier ; offre de presse nationale ou régionale ; point de vente agréé pour paiement automatisé des amendes ; délivrance de timbres fiscaux au format papier ; réception/dépôt de colis au bénéfice des usagers ; délivrance de titre de transports nationaux, régionaux, intercommunaux ou communaux ; offre de services bancaires de proximité ; relais postaux ; délivrance de timbres-amendes sous format papier ou existence d’un agrément en cours ; offre de jeux de grattage, de loterie ou paris sportifs ou encore hippiques ; offre de services téléphoniques ; commerce alimentaire de proximité offrant des produits de première nécessité ; offre de services numériques type wifi ; station essence ; services à la personne (encaissement de factures pour compte de tiers, dépôt pressing et fourniture de bombonnes).