Bail commercial : départ à la retraite du locataire

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Bail commercial : départ à la retraite du locataire

Pour favoriser leur départ à la retraite dans de bonnes conditions économiques, les commerçants exploitant un fonds de commerce ont intérêt à anticiper la recherche d’un repreneur. Sinon, ils peuvent résilier, mais moins avantageusement, le bail à tout moment.
 

Ces prérogatives particulières, inapplicables aux dirigeants de SA et SAS, bénéficient aux commerçants personnes physiques, à l’associé unique en EURL, à l’associé majoritaire de SARL depuis au moins deux ans et aux personnes admises au bénéfice d’une pension d’invalidité attribuée dans le cadre du régime social. La Loi Pinel du 18 juin 2014 les a étendues à leurs héritiers.

I – Cession du bail ou du fonds de commerce

Si le fonds de commerce est attractif ou si les locaux se situent dans un lieu valorisé, le locataire trouvera économiquement avantage à transformer son patrimoine commercial en liquidité valant épargne au départ en retraite pour exercer une autre activité (« cession-déspécialisation », art. L. 145-51 Code de commerce) : il cède, au choix, son droit au bail avec l’accord du bailleur – non requis le plus souvent – ou son fonds de commerce à la cession duquel le bailleur ne peut s’opposer.

  • Le local concerné est-il situé dans un périmètre de sauvegarde ouvrant pour la commune du lieu droit à préempter (exercer une priorité de rachat du bail) ? Si tel est le cas, le locataire doit adresser à la commune, par courrier LR/AR et en 4 exemplaires, une déclaration préalable sur la cession du bail précisant prix et conditions de la cession. A réception, la commune dispose de 2 mois pour décider de préempter ou non. Si elle préempte, une autre procédure s’applique.
  • Si le local est situé hors d’un périmètre de sauvegarde ou si la commune ne souhaite pas préempter, le locataire restera vigilant sur trois points pour anticiper au mieux les trois options s’offrant au bailleur.
    • Les 3 points de vigilance du locataire :
      • 1 – Signifier au bailleur et aux créanciers inscrits sur le fonds de commerce, par acte d’huissier, son intention de céder le bail. Nature des nouvelles activités envisagées et prix de cession proposé par l’acquéreur pouvant rester anonyme y figureront.
      • 2 – Même après demande du bénéfice de ses droits à retraite, l’exploitation du fonds de commerce se poursuit jusqu’à cession effective du bail ;
      • 3 – Sa cession d’activité et radiation du RCS entraîne perte de ses droits vis-à-vis du bailleur.
  • Les 3 options s’ouvrant au bailleur :
  • 1 – Il accepte expressément ou garde le silence 2 mois suivant notification ;
  • 2 – Il exerce son droit de préemption dans les 2 mois de la signification et selon les conditions de celle-ci, en particulier au regard du prix ;
  • 3 –  Il exerce son droit d’opposition à l’exercice des nouvelles activités envisagées : il saisit en ce sens le TGI du lieu du fonds de commerce dans les 2 mois suivant notification, invoquant soit l’incompatibilité desdites activités avec la destination du fonds de commerce ou avec la situation de l’immeuble ; soit pour manquement aux obligations contractuelles du bail. Si le juge considère injustifiée l’opposition du bailleur, il peut le condamner à verser des dommages et intérêts au locataire.

 

Le bailleur peut-il demander en contrepartie, au nouveau locataire, indemnité ou révision du loyer ? A cette question laissée ouverte par le législateur, une réponse ministérielle de 1991 a indiqué que le bailleur pouvait percevoir une indemnité correspondant à son préjudice démontré ou bien demander révision du loyer dans les 2 mois de la signification.

Dans tous les cas, selon la jurisprudence, si la déspécialisation n’ouvre pas droit à une modification du loyer, l’acceptation des nouvelles activités par le bailleur peut motiver valablement déplafonnement lors du renouvellement du bail.

 

Si le locataire n’a pas anticipé sa stratégie de cession, il peut résilier le bail à tout moment, sans attendre l’expiration d’une période triennale, en formalisant son congé.
 

II – Le congé-retraite

 

Cette faculté, qui joue essentiellement dans l’intérêt du locataire, fait courir au bailleur le risque de voir son local inoccupé entre le départ en retraite du locataire et le terme prévu dans le contrat. Un risque que le bailleur ne perdra pas de vue s’il se voit sollicité par un commerçant d’un âge proche de celui de la retraite. De son côté, le locataire gardera aussi en tête le risque de devoir continuer à payer le loyer, même après son départ en retraite, s’il ne respecte pas le formalisme requis pour donner son congé-retraite. Aussi, et dès la négociation engagée en vue de conclure le contrat de bail commercial, il importe pour les deux parties d’anticiper toutes les conséquences de ce droit dérogatoire au profit du locataire.

 

Le droit au congé-retraite prévu par l’article L.145-4 du Code de commerce est soumis à un certain formalisme pour être exercé valablement dès lors qu’il déroge au principe obligeant le locataire à attendre la fin de la période triennale pour demande de résiliation anticipée. Pour permette au bailleur d’organiser efficacement la reprise, le locataire doit respecter un préavis ne pouvant être inférieur à 6 mois avant la date de départ initialement prévue au contrat en fin de trimestre civil. Conséquence : le locataire n’est donc plus tenu par les échéances triennales du bail et peut donner congé à tout moment.

 

Le locataire ne quittant pas les lieux au terme du préavis s’expose à être considéré comme ayant renoncé à son congé. Le locataire donnant congé renonce à toute indemnité d’éviction et à tout droit ; les aménagements réalisés deviennent propriété du bailleur, sans indemnité le plus souvent.

 

                                                          Mis à jour par l'agence éditoriale Sub Verbo le 4 août 2017