De la finance à la déco

Après un exil parisien pour travailler dans la finance, Franck Charlier, Rémois de naissance, est revenu dans la capitale champenoise avec un désir secret : reprendre un commerce. Récit d’une acquisition minutieusement préparée.
Par Sophie MENSIOR -  
Le 17/09/07
Même s’il aimait passer du temps dans l’épicerie de sa tante, c’est vers les métiers de la finance que Franck s’oriente après avoir obtenu son diplôme « sup de co ». Cette nouvelle “passion” l’amène à quitter sa Champagne natale, à 24 ans, pour rejoindre les grandes banques parisiennes. Il y apprend, notamment, à se servir des outils de gestion : “J’avais déjà à l’esprit de créer mon entreprise à 35 ans, reconnaît-il. Je savais donc que cet apprentissage serait important pour la suite de ma carrière.

Mais lorsqu’il décide de retourner à Reims, il se heurte à une réalité professionnelle frustrante : un retour en province, oui ! mais pour faire quoi ? “Je savais que je n’avais aucune chance de quitter la Capitale dans le cadre de mon travail, confirme-t-il. Heureusement, la société qui m’employait a décidé de transférer sa salle de marché en Allemagne. J’ai donc pu négocier un licenciement.”

De retour en Champagne, Franck sait que son avenir s’inscrit dans le commerce et prospecte dans deux directions, la librairie et la décoration. Rapidement, il penche pour la seconde option : “La librairie, qui requiert un gros investissement financier, était de plus trop intellectuelle à mon goût. En outre, le marché n’est pas très florissant, justifie-t-il. J’ai senti, en revanche, qu’il y avait une place à prendre dans la décoration, qui faisait partie de mes centres d’intérêts à Paris.”Méticuleux, il entreprend alors une analyse sectorielle poussée, puis suit une formation AFPA sur la création et la gestion d’entreprise. Le processus de maturation va durer presque deux ans. Une fois convaincu de posséder une bonne connaissance du marché, il se met à chercher un local mais les premières prospections ne sont guère concluantes : “Je m’étais fixé un budget de 100 000 euros avec une présence impérative dans l’hypercentre, précise-t-il. Je n’avais en tête que l’emplacement…”

Fort de sa connaissance de la ville, il sait que l’activité qu’il veut entreprendre requiert du passage, son futur magasin doit donc être situé dans le carré d’or commercial : “J’étais persuadé que la prise de risque serait trop importante si je déviais de cette idée.” Après quelques opportunités pas très enthousiasmantes, il repère un local au 13 rue Max-Dormoy. Le prix exorbitant de l’affaire le décourage tout d’abord, mais après réflexion, il décide finalement de s’en porter acquéreur.

La boutique est une “jeannerie” au chiffre d’affaires en chute libre et c’est donc le droit au bail que Franck convoite. Un fonds que, secret des transactions oblige, Gilbert Abitbol, un agent immobilier spécialisé dans les baux commerciaux, estime à 300 000 euros. Ne disposant que de 20 % du prix total, Franck se tourne alors vers plusieurs établissements bancaires. Le financement s’avère difficile : “Il m’a fallu beaucoup argumenter, car mon absence d’expérience, couplée à leur méconnaissance du marché de la décoration, les rendait frileux.

Franck bénéficie alors du concours de son beau-père qui entre dans l’affaire et au capital, ce qui débloque en partie la situation : “La banque voulait absolument des garanties immobilières pour nous donner satisfaction”, explique-t-il. Une fois la demande de déspécialisation effectuée, il peut enfin ouvrir son magasin, en décembre 2006. Résolument optimiste, il aborde l’avenir comme un “contre-la-montre” : “Il y a une demande. Il faut simplement ne pas relâcher l’effort. Je suis heureux dans ma boutique, car je vois tout de suite les retombées de mon travail. »