La patience du pêcheur

Issu d’une famille modeste, Jean-Yves Lavallez a racheté, après 15 ans de bons et loyaux services et beaucoup de travail, la poissonnerie dans laquelle il a débuté. Récit d’une reprise volontariste et savamment orchestrée.
Par Sophie MENSIOR -  
Le 29/10/07
L’homme ne s’en cache pas, cette poissonnerie, c’est sa fierté. Non feinte, lorsqu’il trace les contours de son parcours d’autodidacte, lucide sur ses origines sociales et déterminé depuis toujours à s’en sortir. Quand la société de poissonnerie “Le Chalut”, qui distribue sur les marchés, cherche un apprenti, il se porte candidat et très vite montre sa implication.

15 heures de travail par jour, Jean-Yves apprend le métier. Il écoute, observe et fait preuve d’une grande capacité de travail. Son engagement va bientôt être récompensé. L’opportunité se présente, en 1987, de racheter une poissonnerie à Montfermeil. Une occasion que ses patrons ne laissent pas filer. Iis proposent à Jean-Yves d’en être le responsable. Une juste reconnaissance de son investissement et de sa fidélité à leur égard : “J’ai toujours entretenu cette boutique comme si elle m’appartenait, d’ailleurs la clientèle pensait que j’en étais le propriétaire”, se souvient-il, ému.Aussi, lorsque ses employeurs l’informent en 2000 de leur intention de vendre “A la Marée Gourmande”, c’est tout naturellement qu’il se porte acquéreur de ce magasin dans lequel il s’est tant investi : “Je me suis dit que si j’avais réussi à le tenir pendant 13 ans, il n’y avait pas de raison que je ne sois pas capable de le racheter. Voir des gens moins motivés que moi s’en sortir à Rungis m’a conforté dans l’idée qu’il ne fallait pas hésiter”, argumente-t-il.

Mais Jean-Yves n’a pas les moyens financiers nécessaires à cette reprise. D’autant que les propriétaires entendent également céder les murs : “Le prix du fonds n’était que de 70 000 francs étant donné que j’étais en grande partie responsable de la bonne santé du magasin, mais les murs coûtaient 350 000 francs. Auxquels il fallait encore ajouter 300 000 francs pour la rénovation”, détaille-t-il. Au total, c’est un emprunt de 720 000 francs que Jean-Yves doit obtenir pour mener à bien son opération de reprise.

Mais les banques sont frileuses à l’idée de financer une affaire à Montfermeil, plutôt connue pour son insécurité. Loin de se décourager, Jean-Yves entreprend méthodiquement de monter un dossier, afin de convaincre un établissement financier de la viabilité de son projet : “J’ai eu la chance d’avoir un Crédit Lyonnais en face de ma poissonnerie. Ma conseillère me connaissait depuis 20 ans, savait comment je travaillais et quelles étaient les perspectives économiques du quartier, explique-t-il. Les décideurs financiers ont aussi pu venir constater à plusieurs reprises la véracité de mes propos.